Lambayeque et Túcume

Le 9 mars sur la route de Chicama vers le nord notre deuxième bus tombe rapidement en panne. En six mois de voyage c’est tout juste la deuxième fois. La première c’était dans le bus de San Juan à Tucuman en Argentine mais il avait redémarré.
Lorsqu’au bout de 15 minutes nous avons l’impression que le problème ne va pas bientôt se résoudre nous demandons au cobrador (celui qui encaisse la monnaie) qui avait essayé de nous escroquer de plus du double du prix normal, de récupérer nos sacs et notre argent. Il fait traîner, nous nous énervons contre lui et contre les passagers qui constamment balancent leurs poubelles par la fenêtre et heureusement il ne faut pas longtemps avant qu’un autre bus passe et qu’on puisse continuer.
Le Pérou est un pays incroyable, mais qu’est-ce qu’il est sale ! Il n’y a pas la moindre conscience environnementale, les péruviens vivent dans leurs déchets.

Avant de continuer pour la côte nord du Pérou nous voulons faire un arrêt près de Chiclayo pour visiter des sites archéologiques. Nous n’avons que l’embarras du choix, il est plus que difficile de nous décider sur les sites que nous privilégions tellement il y en a.
Sur tout ce territoire de très nombreux sites archéologiques témoignent de l’histoire riche des anciennes civilisations, comme dans la région autour de Trujillo.

Chiclayo, capitale du département Lambayeque est et a toujours été une ville importante dans le nord du pays, un carrefour de l’activité commerciale entre la côte, la sierra et la jungle du nord.
C’est le peuple Moche (ou Mochica) qui a d’abord habité cette région entre le Ier et le VIIe siècle développant un système d’irrigation qui a permis le développement de la région. Ils repoussent les limites de leur empire sur 600 kilomètres de côtes. Les Moches laissent leur trace avec leur céramique ultra réaliste, images sculptées ou vases décorés au pinceau, d’hommes, de divinités, d’animaux ou de scènes de grande perfection et réalisme. C’est une société très hiérarchisée aux taches spécifiées.
Le dieu principal s’appelle Ai-Apaec, c’est le dieu du ciel, le créateur. On l’appelle aussi le décapiteur et il est souvent représenté comme une araignée et tient une tête dans une main par les cheveux. Les têtes coupées on en a trouvé pas mal, il ne s’agit pas d’un mythe.
On estime que la civilisation Moche a décliné et s’est dégradée en raison de catastrophes climatiques, tremblements de terre, inondations dues au phénomène d’El Niño.

La civilisation Lambayeque ou Sicán a pris la suite de la Mochica en assimilant leur traditions et connaissances sans toutefois posséder un empire si grand ni une telle complexité politique. Les Lambayeque excellent en architecture, orfèvrerie et navigation.

Nous nous décidons pour la petite ville de Lambayeque à 10 kilomètres au nord de Chiclayo. Elle se situe sur la Panamericana ce qui permet de ne pas nous faire perdre de temps.

A Lambayeque se trouve le fantastique et moderne musée des tombes royales de Sipán (Museo de las Tumbas Reales de Sipán) que nous avons juste le temps de visiter avant la fermeture le jour de notre arrivée.
Nous n’avons sûrement pas encore vu autant d’or pendant notre voyage, du moins en dehors des églises. Ce musée contient tellement de trésors que nos yeux s’en lasseraient presque. L’or, l’argent, le cuivre, les pierres précieuses, le coquillage Spondyle (ou huître épineuse, la « nourriture des dieux »)… le musée accueille les trésors et la reconstitution complète du tombeau d’un seigneur Moche du IVe siècle et également de celui de son père trouvés dans une pyramide de la région.

La tombe du Señor de Sipán se situe à 40 km au sud de Chiclayo. Il s’agit de deux pyramides d’adobes érodées et séparées par une grande place de 60 mètres. De loin on dirait des montagnes érodées, on ne se doute pas ce que ce lieu cache, la « Huaca Rajada ». La tombe a été découverte en 1987 et a permis de mettre au jour un des mausolées royal les plus importants de la civilisation Moche et de sauver des mains des profanateurs des trésors de valeur inestimable. Il s’agit d’un sanctuaire où eurent lieu les enterrements de la haute hiérarchie Moche.
Le Señor de Sipán est né il y a 1700 ans, mesurait 1,66m et ne devait pas avoir plus de 45 ans à sa mort. Il était enterré dans une caisse en bois, il portait entre autres des boucles d’oreilles d’or et de turquoise, trois lances et sandales d’argent. Son corps était orienté avec exactitude, les pieds au nord et la tête au sud, à sa droite naît le soleil et à sa gauche il disparaît, le señor étant donc l’équilibre entre le jour et la nuit, entre le soleil et la lune, entre la dualité des opposés qui se complètent.
Enterré avec lui, sur plusieurs couches au dessus et en dessous de lui, un énorme trésor de cuivre et d’or, une extraordinaire couronne d’or en forme de demi-lune, des emblèmes, des colliers notamment en or en forme de cacahuètes, des boucle d’oreilles, des disques ou rondelles (qui se portaient aux oreilles), des sceptres cérémoniels, des médaillons, un lourd lingot circulaire d’or massif, des anneaux (qui se portaient au nez), des coiffes, des œillères, des heaumes et des mentonnières en or et ornements cérémoniels d’une énorme qualité d’orfèvrerie (plus de 400). Le raffinement et la complexité de ses bijoux les placent parmi les plus belles et les plus importantes trouvailles précolombiennes. Autour de lui il y avait 8 autres squelettes humains (dont trois femmes et un enfant), deux de lamas et un chien.

Il ne faut pas rater ce musée en forme de pyramide qui nous emmène par une rampe depuis le haut toujours plus profond à la manière des archéologues découvrant le tombeau. Il s’en trouve d’ailleurs d’autres, comme celui du Señor d’Ucupe découvert en 2008 ou du Viejo Señor, apparemment père du Señor de Sipán. Chaque tombeau s’accompagne de ses trésors.
Le tout est présenté magnifiquement dans une ambiance calfeutrée et mystérieuse sur fond de musique indigène. Quelles émotions.

Sur la Panamericama nous finissons par trouver après une longue recherche un hôtel simple et correct puis dans le centre un bon repas incroyablement pas cher.

Le lendemain matin nous prenons un mini bus pour Túcume suivi d’une moto-taxi pour découvrir le complexe archéologique ou la « vallée des pyramides » de la culture Lambayeque qui date de 600 à 1000 après J.-C. Selon la légende, il fut fondé par Calac, descendant de Naymlap. Naymlap serait arrivé par la mer sur une embarcation en roseau (comme on en trouve encore). Il est représenté avec des yeux très bridés et accrédite l’hypothèse d’une migration océanienne vers le Pérou. La culture Lambayeque se situe après la culture Moche

Le site de 220 hectares se compose de 26 pyramides dont la Huaca del Pueblo, Mirador, Pintada, La Raya, El Sol et Las Estacas. La colossale Huaca Larga de 700m de long, la plus grande de 30m de haut et 196 m² était construite en adobes et recouverte d’un enduit peint et elle est considérée comme l’une des plus grandes construction en adobes du monde. Le Templo de la Piedra Sagrada a été le lieu de sacrifices humains par centaines. Les autres pyramides doivent avoir été de 15 mètres de haut. Les pyramides américaines ne sont pas comme les égyptiennes, elles ne terminent pas en pointe mais sont constituées de plate-formes en haut desquelles se situe un temple.
Le site a été réutilisé par les chimus et les incas pour l’usage cérémoniel.

Une superbe petite vidéo (déjà mise dans l’article “Trujillo et les alentours“):

  • Les 3 premières minutes pour la culture Moche et les Huacas de la Luna y del Sol près de Trujillo
  • De 3:11 minutes à 5:50 sur le Señor de Sipán et les pyramides.
  • De la minute 9 à 10, la vallée des pyramides de Túcume
  • Suite et fin pour la culture Chimú et Chan-Chan près de Trujillo

Lorsqu’on ne le sait pas on voit des collines de terre mais pas des pyramides. Il faut dire que le matériel utilisé et les pluies torrentielles dues à El Niño ainsi que l’âge des bâtiments sont responsables de cette fantastique érosion.

Ici les excavations et la mise en valeur du site vont bon train. Partout sur le sol désertique on remarque que la terre se compose de reste de céramiques, nous marchons sur un trésor. Dans un mois la Huaca Laga sera ouverte au public et dans quelques années la visite vaudra sûrement encore plus le coup.
Nous nous baladons sous un soleil de plomb jusqu’au mirador qui permet de nous rendre compte de l’immensité et également du nombre de pyramides qui reste à fouiller.

Le musée du site est bien fait et également assez moderne. Il permet de souffler après l’intense soleil reçu lors de la balade. Précisons aussi l’invasion de moustique à chaque zone d’ombre. Tout ceci rend la visite très éprouvante !

Nous repartons vers midi de nouveau à Lambayeque puis prenons un bus pour Piura le 10 mars. Nous nous décomposons sous la chaleur torride du désert péruvien. Vivement arriver à la plage à Lobitos !

  1 comment for “Lambayeque et Túcume

  1. Jette&Jarda
    5. mai 2016 at 23:25

    Na denn, Ihr beiden, wir sind wieder auf Eurer Spur (blog)!!! – nachdem wir natürlich schon Vieles inzwischen von den Eltern erfahren haben. Eure Reiseberichte lesen sich nach wie vor sehr anschaulich u. spannend, u. die Filmchen machen das Ganze perfekt! Wir lernen nebenbei so einiges über das Surfen!
    Weiter eine gute Zeit
    wünschen Jette &Jarda

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