Trujillo et les alentours

Le 5 mars au petit matin nous arrivons en bus depuis Lima à Trujillo.
Un petit déjeuner tranquille nous permet de réfléchir au programme de la journée. Difficile d’évaluer du temps dont nous avons besoin pour découvrir l’immense patrimoine archéologique que les alentours ont à offrir.

Nous décidons de rester flexibles, laissons pour le moment nos sacs au café où nous nous trouvons et partons tout d’abord pour le site archéologique de Chan-Chan qui signifie “soleil-soleil” ou “ville chaude”. On a déjà tellement chaud qu’on en saisit directement le sens!
Nous prenons un mini bus qui nous dépose devant la piste qui conduit au temple de Tschudi où avec Cedric, un français sympa qui arrive de l’Equateur nous négocions les services d’un guide pour toute la journée à 50 soles (sans les frais de transport qu’il négocie super bien à chaque nouveau taxi).

La merveilleuse ville de Chan-Chan, capitale du règne Chimú, se trouve face à la mer, proche de l’embouchure de la rivière Moche, occupant à peu près 24km². C’est la plus grande ville en adobes précolombienne des Amériques et sa grandeur impressionne autant que sa détérioration.

Il y a trois secteurs, le principal est un ensemble de constructions rectangulaires connus comme étant des palais ou forteresses autour desquels se trouvent des zones d’habitations.
Il y a dix grandes aires rectangulaires délimitées par des murs d’adobes qui peuvent atteindre 10 mètres de haut. Toutes sont orientées du nord au sud et partagent la même structure générale. A l’intérieur l’espace est divisé en une série de patios avec des rampes (pas d’escaliers car le matériau fragile ne s’y prête pas et que c’est plus facile pour les porteurs du  chef qui ne marche jamais), couloirs, chambres, structures en forme de U, plate-forme funéraires, dépôts, ateliers, grands puits d’eau rectangulaires… généralement il n’y a qu’un seul accès côté nord et pas de porte. Les palais sont appelés Gran Chimú, Velarde, Squier, Tello, Uhle, Laberinto, Cihuac, Tschudi, Rivero et Bandelier.

Une des caractéristiques de la société Chimú est sa division rigide en groupes sociaux. Dans les vrais palais ne vivait que la noblesse choisie et complètement isolée du monde extérieur et l’accès aux palais était restreinte. Ces palais ne servaient pas seulement de logement, s’y réunissaient aussi les fonctionnaires chargés de recevoir le tribut du peuple. Il n’y avait pas de monnaie, chaque artisan payait dans le produit de son labeur.
On suppose que chaque palais appartenait à un gouverneur et qu’à sa mort il y était enterré. Le palais continuait alors à lui appartenir et ses parents continuaient à y vivre et à le vénérer.
Le prochain gouverneur construisait alors un nouveau palais, ce qui veut dire que les palais ont tous été construits l’un après l’autre selon la mort des gouverneurs.
On estime que la population a pu atteindre les 40000 personnes.

Le premier palais que nous visitons, Tschudi, est impressionnant du fait de ses nombreuses frises en argile et détails géométriques de poissons et oiseaux sur les murs en relation à la mer. On sait qu’ils étaient colorés, il en reste ça et là la trace. Ici, peu de sacrifices humains mais de lamas endémiques de l’époque, plus petits et plus adaptés aux températures de la côte que les lamas de la montagne. Ils n’existent plus, les bovins et chevaux amenés par les espagnols étaient porteurs de germes qui ont éteint cette espèce. Les nobles qui habitaient les palais ne vivaient pas vieux, ils étaient faibles, hémophiles et consanguins, tous mariés entre frères, sœurs et cousins afin de garantir la pureté de leur sang. Du coup, le gouverneur avait des dizaines de femmes dont les enfants avaient du mal à survivre.
Nous visitons plusieurs temples, Esmeralda consacré à la pêche, l’Arco Iris dédié à l’agriculture et la fertilité, impressionnant pour toutes les frises qui y sont encore et les 365 figures pour chaque jour de l’année.

Les Chimús arrivent juste après les Moches (ou aussi appelés Mochicas), aux alentours de 800 après J.-C. et seront renversés par les Incas vers 1470. Au contraire des Incas ce sont des adorateurs de la Lune qui crée les marées, dirige le cycle des femmes, crée le calendrier… alors que le soleil est particulièrement destructeur dans cette région désertique du Pérou.

Les Moches ont laissé aussi des traces importantes de leur culture et nous en visitons un des plus beaux exemples après Chan-Chan, les Huacas del Sol et Huacas de la Luna sur le cerro Blanco, à gauche de la rivière Moche.
Avant les Moches, les cultures Salinar et Virú ont occupé le lieu et après, les Huari, les Chimus ainsi que les incas mais c’est la culture Moche qui donne le plus de grandeur à ce site utilisé pendant des milliers d’années comme centre cérémoniel.
Entre les deux Huacas (temples) vivait le peuple qu’on estime à environ 25000 personnes.

La Huaca del Sol est formée de plusieurs plate-formes à différents niveau et on estime que la taille a réduit d’un tiers et que la forme devait être une croix. Il doit avoir fait 345 x 160 mètres de surface et 30 mètres de haut et il est estimé que pour sa construction il aurait fallu 140 millions de briques d’argile pour les 11 plate-formes. Ce monument n’est pas encore habilité aux visites.

Juste à côté, la Huaca de la Luna est un monument qui couvre 290 x 210 mètres et compte une énorme plate-forme de briques d’argile, une autre plus petite et une troisième de taille moyenne à un niveau plus haut que les deux autres. Ces trois plate-forme étaient articulées par quatre places et tout est délimité par de larges murs de briques.
On sait que ces constructions ont évolué et grandi avec le temps, quand le gouverneur mourrait il était enterré sur place et le suivant se contentait de rajouter un niveau de briques et modeler une nouvelle plate-forme. Il y en a eu 7 en tout, pour 600 ans de construction. On effaçait ni ne détruisait rien, on recouvrait. Ce qui est fascinant c’est de voir qu’en creusant on ne retrouvait pas seulement les tombes et toutes les richesses mais les frises avec les couleurs encore intactes.
Dans cette Huaca à deux endroits spécifiques ont eu lieu de nombreux sacrifices humains, parfois de vraies hécatombes si les sacerdoces considéraient que les dieux le voulaient. Pour le sacrifice le sacerdoce coupait la jugulaire après avoir donné un anticoagulant au condamné et le sang qui coulait était récolté pour être ensuite bu par les responsables religieux. Vilains vampires!
Nous visitons aussi le musée qui se trouve non loin des deux Huacas et qui vaut vraiment la peine. Les richesses retrouvées dans les Huacas s’y trouvent en partie, et bien plus encore ce qui permet de mieux comprendre les civilisations moches et Chimús. Là non plus pas de photo autorisées.

Une superbe petite vidéo qui explique bien mieux que moi!

  • Pour la culture Moche et les Huacas de la Luna y del Sol, regarder les 3 premières minutes
  • La suite de la vidéo est pour la prochaine-prochaine étape à Lambayeque, sur le señor de Sipán et les pyramides. Je la remettrai dans l’article correspondant.
  • Pour la culture Chimú et Chan-Chan regarder la vidéo à partir de la dixième minute jusqu’à la fin (4 minutes).

Cette journée de visite a été aussi fascinante que fatigante. Nous reprenons en fin d’après-midi nos sacs et remontons dans un mini bus direction Huanchaco où nous voulons passer la nuit. J’aimerais voir les bateaux traditionnels (3000 ans déjà) construits en roseau qui s’appellent Caballitos del Mar, et Tobi aimerait faire du surf.

Nous sommes un peu trop harassés lorsque nous arrivons enfin et nous laissons bêtement convaincre par le premier logement lorsque nous descendons du bus : Le Huanchaco Inn nous propose pour 40 soles une chambre double. C’est sombre, sans air, les draps sont sales (pleins de cheveux dedans) mais on nous les change tout de suite, enfin pas génial mais acceptable pour le prix alors on décide de rester. C’était une erreur et nous passons une nuit affreuse, je ne rentrerai pas dans les détails.

Le lendemain midi, le 6 mars, nous repartons après le déjeuner pour une autre étape détente sur les côtes péruviennes : Chicama

  1 comment for “Trujillo et les alentours

  1. james
    7. avril 2016 at 17:38

    Quelles drôles de cases , j’imagine la chaleur au milieu de toute cette terre cuite !!
    Mais alors , vous n’avez pas essayé les caballitos del mar, rien que pour le nom je me serais laisser tenter.

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