Caleta Tortel

Le 22 décembre nous partons de Villa O’Higgins, le bout de la Carretera Austral, cette route emblématique de 1240km qui part de Puerto Montt, grand projet de Pinochet pour pouvoir accéder aux territoires du pays les plus reculés.

Il pleut et nous sommes soulagés d’être au sec dans un bus d’une vingtaine de place que nous sommes bien peu à remplir: à part une touriste asiatique il n’y a que nous, les débarqués de Candelario Mancilla.

La route est impressionnante. Parfois elle est si étroite que le passage d’une seconde voiture est délicat. De toutes façons on ne croise pas un chat. Cela ne tient pas seulement au dépeuplement de cet endroit mais aussi au passage obligé par un bac qui ne part que trois fois la journée.
Lorsque le bus bifurque de la Carretera Austral pour rejoindre Tortel nous longeons pendant 20 kilomètres le Rio Baker. Nous sommes bluffés par ce paysage et le changement de la nature qui s’opère sous nos yeux.

Caleta Tortel est un endroit très spécial. Tout le village de peut être 500 habitants est construit sur des passerelles et pilotis en bois. Les nombreuses passerelles conduisent sur sept kilomètres à l’ensemble des bâtiments officiels et habitations, école, salle omnisports, supermarché, administrations…
Quand nous arrivons il pleut des cordes ce qui n’est pas inhabituel ici.
Le village à l’embouchure du fleuve Baker n’est pas relié depuis plus de 15 ans à la route et le village aurait été voué à l’abandon si certains n’avaient pas lutté pour en faire un lieu touristique.
C’est l’exploitation du bois de cyprès qui a conduit des familles à s’installer à cet endroit si isolé. Le village n’existe que depuis les années 50. Pour les besoins essentiels comme l’électricité une turbine à la sortie du fleuve alimente le village par intermittences : de 7 heures 13 heures et de 20 heures à minuit. Même quand il y a de l’électricité ce n’est pas assez stable pour regarder la télévision par exemple qui ne fait que s’arrêter et les lampes à la lumière aussi vacillante qu’une bougie.
L’internet est rare et le WIFI absent. Les villageois vivent au rythme de l’électricité, les boutiques ouvrent quand elle revient. C’est vraiment spécial !

Nous disons au revoir à nos amis Attie, Lené et Stefan qui continuent la route et nous cherchons un lit pour la nuit. Nous voulons nous imprégner davantage de cet endroit qui semble oublié. Après une longue recherche nous posons nos sacs à l’hospedage Estilo et après une cazuela et quelques empanadas nous continuons à nous balader. Lorsque le dernier bus de la journée part il y a encore moins de gens visibles et les quelques personnes que nous croisons sur les passerelles nous saluent toutes.
Nous avançons sur le sentier de la « Bandera » qui nous offre un point de vue sur le village en contrebas, l’embouchure du Rio Baker et bien plus encore. Il pleut de temps en temps et le chemin est boueux.

Le jour suivant, le 23 décembre, nous nous levons tôt et tentons notre chance le pouce levé : le seul bus direction Cochrane part à 15 heures et nous voudrions être ce soir déjà à Puerto Bertrand.
Nous gardons espoir malgré le peu de voitures qui partent. Nous remarquons même un mini bus dont personne ne nous avait parlé parce qu’on le garde pour les locaux vu le manque de places disponibles. Tout d’un coup les gens ne nous paraissent plus si sympas !
Au bout de deux heures notre patience paie et les deux que nous abordons veulent bien nous prendre avec eux. Il était temps !
Nous voilà en route avec deux tortelinos (pas tortelinis!) pour 128 kilomètres de piste direction Cochrane, youpi !

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