Puerto Rio Tranquilo

Le 26 décembre après un court essai de stop infructueux sous la bruine nous prenons le minibus que nous voyons passer direction Puerto Rio Tranquilo, un petit village sur les bords du très grand lac General Carrera (du côté argentin le lac s’appelle Buenos Aires).

Nous prenons dès notre arrivée la dimension touristique du village qui est tout de même bien plus grand que Puerto Bertrand en restant quand même un village. Sur la route principale, la Carretera Austral, là où le bus nous dépose, s’alignent les petites cabanes des différentes agences de tourisme pour les activités que le coin propose. Après ces quelques jours à voir si peu de gens nous nous inquiétons de ne pas trouver de lit disponible et bon marché. Finalement au Residencial La Paz nous trouvons ce que nous cherchons: pour pas trop cher une chambre avec le WIFI, l’usage possible de la cuisine et c’est propre. Rebecca et Raphaël nous y rejoignent peu après.

Un peu plus tard nous partons visiter les „Cavernas de Marmol“, des grottes naturelles de marbre (formation minérale de carbonate de calcium) creusées par le lac. Si les roches sont du paléozoïque supérieur (près de 300 millions d’années) la formation des cavernes n’est que post-glaciaire : les géologues leur donnent moins de 15000 ans. Même avec ce temps gris et cette bruine nous trouvons ce spectacle remarquable. Le camaïeu de gris qui fait des tours et détours, ces cavités tortueuses dans lesquelles nous nous introduisons tant bien que mal, la structure poreuse et portant les traces de la lutte naturelle, des traces de l’ébullition et du temps, ces colosses suspendus et retenus par de bien trop fins piliers qui manquent de céder à chaque instant, le tout enrobé par l’eau cristalline du lac, autant de contrastes qui font de cette excursion un must à ne surtout pas rater.

Le retour avec notre barque est beaucoup plus mouvementé que l’aller. Rien que ce retour est une aventure ! La « mer » s’est levée et c’est sûrement limite pour ce type d’embarcation. Nous comprenons comment la tragédie qui a emporté le célèbre Douglas Tompkins sur ce même lac deux semaines plus tôt a pu arriver : Le très célèbre protecteur de la Patagonie, fondateur des marques de vêtements The North Face et Esprit, défenseur de la nature et des causes environnementales qui a racheté des milliers d’hectares de terres (810000 hectares) pour en faire des réserves protégées en Patagonie chilienne est décédé à la suite d’une sortie en kayak.

Le tour nous a coûté 7000 Pesos par personne (à peu près €10) avec 8 personnes sur la barque. Le guide est plus un as de la route que de géologie et à part son speech répété sans doute à longueur de journée il ne peut pas répondre à beaucoup de questions.

Pour le jour suivant nous organisons une randonnée sur le glacier Exploradores avec une guide locale. Cette excursion est elle aussi un standard que propose le village et chaque cabane du bord du lac. Les prix sont les mêmes partout peu importe la taille du groupe. Avec notre guide qui habite et travaille avec l’hospedaje dans lequel nous sommes logés nous obtenons une petite réduction de 5000 pesos par personne car nous sommes quatre : le tour coûte 45.000 Pesos (à peu près €70) par personne. C’est bien moins cher qu’une randonnée similaire plus au sud (qui commence à 120€) mais c’est aussi un glacier moins spectaculaire que le Perito Moreno.
L’autre glacier qui attire du monde est le glacier San Rafael mais il est bien plus loin et l’excursion pour le visiter est plus longue et beaucoup plus chère.

Malheureusement Tobi fait une indigestion pendant la nuit et ne peut pas nous accompagner. J’hésite à y aller car c’est ensemble que nous aimons vivre toutes ces choses nouvelles mais l’envie de marcher sur la glace est tellement forte que j’y vais sans lui.

Nous partons Raphaël, Rebecca, deux touristes chiliennes, la guide Liselotte et moi à 8h30 le 27 décembre. Le temps n’est pas au beau fixe, il fait gris et c’est humide.
Il faut à peu près une heure et demi de route avant d’arriver à l’entrée du parc (gratuite). De là il faut marcher une autre heure et demi, d’abord sur un sentier inondé (en 5 minutes mes pieds sont trempés) puis sur des cailloux, tantôt glissants, tant bien que mal, et enfin 40 minutes plus tard sur de la glace recouverte de roche . La route n’est pas facile, il faut souvent utiliser les mains pour s’agripper. Au bout de 45 minutes à crapahuter nous gagnons un paysage lunaire : Les restes du glacier, la moraine. D’abord ce sont de gros cailloux puis peu à peu de plus petits et l’on peut distinctement remarquer la glace en dessous. On entend des craquement sans voir de chute de glace et j’imagine qu’il ne vaut mieux pas s’aventurer seul ici lorsqu’on ne connaît pas le coin.
Le glacier Exploradores comme la plupart des glaciers disparaît. Il fond bien trop vite pour grossir en hiver et récupérer du volume ce qui fait que d’années en années il faut davantage marcher pour l’atteindre. Finalement deux heures après le départ de l’entrée du parc nous enfilons nos crampons, lorsque la proportion de glace dépasse celle de cailloux. C’est aussi le moment de faire une petite pause de midi, Liselotte nous a préparé quelques en-cas.

Il nous faut tout d’abord apprendre à marcher. Comment ça ? Vous pensiez que ça allait de soi ? Que neni ! Oubliez la démarche chaloupée et élégante les pieds en ligne il faut écarter les pattes pour ne pas risquer d’accrocher un crampon de l’autre coté. Il faut avancer avec une démarche assurée, planter le pied pour qu’il accroche bien et le plus intéressant ce sont les reliefs. Pour descendre souvenez vous de vos premiers instants sur des skis : position cabinet, le poids vers l’arrière en descente et vers l’avant en montée et surtout la pente de face et pas de côté pour ne pas risquer la chute. Dans un premier temps on s’entraîne à marcher. Les crampons dérangent, ce n’est pas agréable. C’est aussi intimidant d’aborder une descente de face : tout le monde sait comme la glace glisse et on ne peut pas s’imaginer aller franco face à la pente en plantant les pieds dans le sol.

Une fois que nous avons tous une démarche plus assurée nous avançons vers le glacier. D’abord dans la glace « sale » (encore mélangée avec des cailloux) puis ensuite la glace propre. Nous entrons dans des cavités, c’est si beau ! La glace est transparente et on voit à une distance indéfinissable les cailloux emprisonnés. Mon imaginaire y voit des mammouths ou autres trésors du passé. L’eau est si pure qu’on ne la voit pas au milieu de la glace. Il est déconseillé de la boire sur le long terme (elle ne contient aucun minéral).

Nous arrivons à un certain point et Liselotte nous dit que nous n’irons pas plus loin. C’est la limite de la zone de « sacrifice ». Le reste ne doit pas être souillé par les trop nombreux touristes que nous sommes chaque jour. Par ailleurs nous sommes dans une zone où la glace n’avance que très lentement, sans danger. Plus loin les reliefs s’accentuent, il y a plus de grottes mais aussi plus de chute de glace.

Le parc a fixé une limite de 90 personnes par jour atteinte tout de même rarement en haute saison. Un jour comme aujourd’hui nous serons peut être 30 touristes à emprunter le même chemin.
Au loin pourtant, dans la brume qui n’est autre que l’évaporation due à la trop grande chaleur (10 degrés à peu près) nous apercevons des silhouettes fantomatiques. Je les envie, j’aimerais tellement avancer encore ! Je suis fascinée par cette glace.

Et voilà il faut maintenant rentrer et refaire le même chemin en sens inverse.
Ce ne sont pas beaucoup de kilomètres mais c’est une route hasardeuse. Les roches bougent et glissent il faut aller doucement et se sentir à l’aise. J’ai de l’équilibre et me sens très à l’aise, vraiment comme dans mon élément.

Ce tour était très intéressant et je n’ai eu de cesse de penser à mon Tobi tout seul à la maison. Heureusement qu’il va mieux et qu’il est resté : L’heure et demi de mini bus avec les vitres cachées par la buée et les courbes n’auraient sûrement pas été le meilleur pour son état.

Le 28 décembre nous nous levons de bonne heure et sommes à 8 heures à la sortie du village le pouce levé. Nous voulons aller à Coyhaique. Si le stop ne marche pas il doit passer 3 mini bus dans la bonne direction alors nous pensons tenter notre chance jusque là.
Apparemment nous n’avons pas de chance. Lorsque le premier bus arrive à 9h30 nous sommes toujours là et il est plein. Les deux bus suivant sont aussi pleins et nous n’arrivons pas à partir. Il y a si peu de trafic ! En plus il se met à pleuvoir et l’aventure commence à être bien moins marrante !

Il est midi quand notre espoir bien amenuisé une camionnette accepte de nous prendre après de longues supplications. Ils veulent bien nous prendre à l’arrière du pick-up à condition que nous restions allongés puisque c’est interdit et que les amendes sont salées. Nous sommes tellement soulagés que nous montons sans plus attendre avec Joseph, un Hongkongais qui comme nous attend depuis tôt ce matin, direction le nord et Coyhaique.
Nous ne sommes pas au bout de nos peines !

Informations pratiques :
Je peux recommander Liselotte notre guide pour la journée sur le glacier. Elle ne dépend pas d’une agence et c’est une locale. Elle s’est lancée il y a juste deux ans et sa douceur, sa bonne humeur et sa patience complètent parfaitement ses connaissances de la nature et des coutumes locales et bien sur son savoir faire. En plus, avec elle vous pouvez vous arranger sur le prix, payer dans n’importe quelle monnaie et aider une petite jeune famille. Elle est super flexible et sympa. «Ecos Patagonia » : ecospatagonia@gmail.com Tel:91501325 et aussi sur facebook.

 

Toutes les photos du glacier ainsi qu’un bon nombre de celles des cavernes sont de Raphaël et Rebecca. Merci à eux!

  2 comments for “Puerto Rio Tranquilo

  1. Maman
    20. janvier 2016 at 10:57

    Splendides photos des cavernes de marbre! Et quel dépaysement sur ce glacier, j’aurais bien aimé moi aussi tester la marche aux crampons…

  2. Marie
    21. janvier 2016 at 16:49

    A mourrir… Que c’est beau. Merci de partager toutes ces choses, images, personnes magiques. Bonne route les Djeuns. Baisers

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