Trois pays: Le barrage d’Itaipu et les chutes d’Iguazú

Il est temps de quitter Asunción et le Paraguay, mais pas avant d’être passés par Ciudad del Este célèbre pour le shopping à bas prix accessible aux brésilien et aux argentins, mais surtout pour son barrage hydro-électrique, deuxième plus grand du monde.

Nous nous équipons contre la pluie qui ne cesse pas et prenons un bus pour la gare routière le 30 octobre. De là inutile de chercher loin, presque toutes les compagnies vont à Ciudad del Este et nous veulent comme clients. Nous prenons le premier qui nous aborde et qui fait sans qu’on le lui demande une ristourne sur le prix. Pour pas cher (55000 guaranis, même pas 10€) nous avons les places panoramiques en haut à l’avant du bus.
Nous arrivons à la tombée de la nuit à notre destination où là aussi il pleut. Il ne nous faut heureusement pas aller loin, nous prenons une chambre à l’hôtel Tia Nancy juste au coin. Une chambre simple, sombre et presque propre qui coûte le même prix que nos deux lits à l’hostel d’Asunción, sans le petit déjeuner. A deux pas nous mangeons pour 2,50€ par personne boissons comprises de la viande et saucisses grillée, accompagnées de manioc bouilli et crudités.

Le lendemain matin le temps semble connaître une fragile accalmie. Nous laissons nos affaires à l’hôtel et partons explorer. Après deux bus dans un état déplorable (comme la plupart des bus de ville au Paraguay, qui ne tombent pas en panne par quelque miracle) nous sommes devant le chemin privé qui mène au centre de visiteurs d’Itaipu Binacional. Cependant, notre chauffeur ne faisant sûrement pas souvent de tourisme il ne sait pas que le centre a changé d’adresse le temps que des rénovations soient mises en œuvre. Zut ! Heureusement la seule voiture qui passe s’arrête et nous dépose au centre temporaire quelques kilomètres plus loin, le temps de discuter avec cet ingénieur du barrage sympa et curieux.
Dès notre arrivée nous renouons avec le tourisme de masse : montrer son passeport, tirer un numéro de bus et nous voilà assis dans un des 3 bus privés et pleins de touristes en mode selfie que la société du barrage organise gracieusement.

Durant une bonne heure nous sommes conduits près du barrage, puis devant, derrière et sur le barrage. De long en large, un flot de paroles et d’informations nous laisse pantois et fascinés par une des 7 merveilles du monde moderne ou l’un des plus grands désastres écologiques de la planète. Je vous en compile une partie :

  • Le projet a coûté 18 milliard de dollars.
  • La construction fait 8 km de large et 200m de haut.
  • 32000 ouvriers, 8000 ingénieurs ont travaillé à la construction du barrage pendant 20 ans.
  • Production de 14000 megawatts d’électricité propre. L’équivalent de 536000 barils de pétrole d’une centrale thermoélectrique seraient nécessaires pour obtenir la même quantité d’énergie.
  • Le volume d’excavation de terre (23,6 millions de m³) et roche (32 millions de m³) d’Itaipu est 8,5 fois plus gros que l’Eurotunnel et le volume de béton 15 fois plus gros
  • Le volume de béton utilisé à Itaipu (12,3 millions de m³) serait suffisant pour la construction de 210 stades Maracanã (à Rio) ou pour construire une autoroute de deux voies de Lisbonne à Moscou.
  • Le fer et l’acier utilisés auraient pu servir à construire 380 Tours Eiffel.
  • Le débit maximum du réservoir d’Itaipu (62,2 mille m³ PAR SECONDE) correspond à 40 fois le débit moyen des chutes d’Iguazú.
  • Le réservoir d’eau de 1350 km² de 220m de profondeur a englouti en 1982 le site de « Sete Quedas », une série de chutes les plus importantes du monde (voir les photos de l’époque), 700km² de forêts, plusieurs espèces de plantes se sont éteintes, et des milliers de troupes indigènes Guaranis et Tupis ont perdu leurs terres

Tout ça pour quoi ? Le Paraguay et le Brésil possèdent chacun 10 turbines, le Paraguay n’utilise que deux des siennes pour produire environ 80 % de son électricité et vend la production des 8 autres turbines au Brésil qui ainsi, avec 18 turbines, contribuent à environ 20 % de l’électricité nécessaire au pays.
Bizarrement le coût de l’électricité pour les habitants du Paraguay est aussi élevé qu’en France. Je ne sais pas l’expliquer !

La visite et cette profusion d’informations est une savante propagande qui a réponse à tout. En effet au-delà du barrage Itaipu Binacional a également lancé de vastes projets écologiques, centre de recherches, musée, 63000 hectares de reboisement, 7 réserves et refuges, un élevage d’animaux en voie d’extinction… Il faut se faire soi-même son idée !

Après cette visite remarquable nous prenons la route pour le Brésil et traversons à pied le célèbre pont qui relie les deux pays, le pont international de l’Amitié en dépassant les nombreuses files de voitures et bus qui attendent leur tour à la frontière. Nous comprenons lorsqu’on voit ce côté de la ville la mauvaise réputation de Ciudad del Este. C’est beaucoup plus sympa vu de l’autre côté! Des espaces verts, équipements sportifs publics, on semble bien vivre ici !

Les formalités sont moindres, sans faire la queue et nous revoilà au Brésil après 10 jours de Paraguay ! Contents de revenir mais aussi tristes de constater à quelle vitesse nous avons perdu notre portugais !

Nous prenons un bus et arrivons en sueur après un moment d’errance à l’hostel Bambu animé et rempli à Foz do Iguaçu. Ouf, deux lits disponibles, encore une fois nous nous retrouvons dans un endroit très touristique pour un long week-end : lundi est férié ! Argh ! Et puis nous avons un déjà vu : même hostel, même style, même propriétaire que celui de Rio du même nom également visité lors d’un long week-end. Zut ! Nous décidons de n’y rester qu’une nuit, décidément les « party hostel » ne sont pas notre style (trop vieux pour ça?)

Il y a vraiment deux styles d’hostels. Nous aimons les auberges de jeunesse authentiques, basées sur l’échange, le partage, chacun donne du sien, nettoie sa vaisselle par exemple, on rencontre d’autres voyageurs ouverts, on glane des informations pour la suite et tout cela dans le calme et la bonne humeur… les autres hostels que nous appelons « party hostels » sont aussi gouvernés par la bonne humeur mais surtout visités par les nationaux en week-end dans un esprit d’économie avant tout : payer le moins possible et essayer d’en retirer le plus possible. On fait du bruit, du bazar, de la saleté, on ne nettoie pas derrière soi et on se croit dans un hôtel. Pas d’intérêt pour les autres puisqu’ils sont la plupart du temps en groupe et prennent le plus de place possible.
Après, au-delà de la fréquentation nous notons les hostels « qui se la jouent », à grand coup de « peace and love » et de beaux slogans joliment peints on fait croire mais au fond tout n’est que commercial et là non plus pas l’esprit de l’auberge et du partage, purement du business.
Nous cherchons donc les endroits « authentiques » qui sont rares. Notre premier soir n’est pas génial mais nous aurons nettement plus de chance le lendemain.

Le soir nous fuyons un peu le bruit et la fiesta de notre hostel et allons chercher à manger.
Foz n’est pas du tout ce qu’on avait imaginé ! Pas une petite ville nature près des chutes mais une grande ville chic d’un quart de millions d’habitants aux allures de las Vegas version verte, où au lieu des Casinos les chutes comme point d’attraction. Nous ne voyons que grandes avenues, immenses restaurants et bars et talons aiguilles. Ici le brésilien vient faire chauffer la carte bleue.
Nous nous faisons méga plaisir et mangeons un beau plat de sushis au prix européen et nous réjouissons de partir dès le lendemain.

Nous avons décidé de visiter les deux côtés des chutes puisque ayant souvent entendu qu’il était dommage de ne pas le faire.
Les chutes sont en fait un ensemble de 275 cascades sur 3 kilomètres de front. Qui peut vraiment compter les cascades franchement ? Bref. L’ensemble déverse un flux d’eau de plus de 6 millions de litres par seconde. Cette merveille de la nature est classée patrimoine mondial depuis 1984 (juste après l’engloutissement des sept chutes juste à côté). Pas besoin de tous ces chiffres qui ne donnent aucune dimension de l’endroit, il faut le voir. Avant d’y être nous en avons vraiment beaucoup entendu parler et tout le monde est émerveillé. Les photos et la vidéo ne sont pas à la hauteur !

Donc le premier jour nous nous mettons en route pour les installations brésiliennes.
Bien que nous nous soyons préparés au tourisme de masse pour cette attraction majeure du continent nous étions loin de nous imaginer ce qui nous attendait.
Dès l’arrivée au centre des visiteurs c’est le choc : nous avons complètement l’impression d’être dans la file d’attente d’Eurodisney tellement la queue est longue et le bâtiment semblable. Finalement nous accédons assez vite aux tickets et nous dirigeons vers les bus obligatoires qui déposent les visiteurs aux différents points de vue.
Au premier arrêt nous avons après quelques mètres de marche une vue d’ensemble qui donne un avant goût du spectacle : seulement un avant goût parce que la distance est tout de même conséquente, comme une carte postale. A nos pieds les mignonnes petites mascottes du parc, des coatis voleurs et gourmands que nous étions si fiers de pouvoir observer sauvages dans le Pantanal. Ici comme des petits singes ils se faufilent, reniflent les sacs, font les poubelles et il n’est pas recommandé de les nourrir car aussi mignons qu’ils sont leur morsure est douloureuse. Nous nous contentons de les observer amusés. Du côté argentin c’est d’ailleurs le même ballet et avec des multitudes de papillons colorés, quelques beaux oiseaux et un unique toucan de loin nous n’avons pas vu d’autres animaux.

Nous continuons alors la route sur les quelques cent mètres et régulièrement nous arrêtons aux plate-formes qui livrent leur secret, des points de vue impressionnants.
Malheureusement notre degré de tolérance atteint ses limites et il est difficile de profiter d’un tel spectacle avec autant de touristes qui ne nous ressemblent pas. On reconnaît les français qui râlent (le propre du touriste français est de croire que personne ne le comprend), on rit jaune devant la folie du selfie et de l’auto-glorification et on attend de moins en moins patients de pouvoir avancer. Dommage ! Si possible, visiter les chutes en semaine et pas le dimanche d’un long week-end (logique!).
Une demi journée est nécessaire pour faire la visite de ce côté-ci. Les autres balades que nous ne faisons pas sont payantes et ne mènent pas à une meilleure vue des chutes, les tours en bateaux sont moins chers du côté argentin et les autres activités payantes ne nous branchent pas, on repart en ville et déménageons nos affaires du côté argentin.

 

Avec le bus nous sommes rapidement de l’autre côté de la frontière. Il nous attend même le temps que les formalités de sortie et d’entrée soient faites. Puerto Iguazú fait une impression bien plus relaxante que son pendant brésilien. La ville doit bien aussi vivre du tourisme mais les maisons ne dépassent pas deux étages et tout est calme, spécialement le charmant Hostel „Garden Stone“ qui porte bien son nom avec petite piscine, hamacs, jardin fleuri, minous et tranquillité. Un bijou, une chambre double avec salle de bain commune pour le même prix que le dortoir de l’hostel Bambu de la veille.

Les chutes du côté argentin nous fascinent. Bien sur c’est un avantage que le jour soit seulement férié au Brésil et que beaucoup de visiteurs soient déjà repartis, mais ce n’est pas que ça. L’infrastructure est elle aussi prévue pour le tourisme de masse et le prix est le même (sauf le bus qui du côté brésilien est le prix d’un bus normal (6 reais aller retour par personne) alors que sur le côté argentin c’est très cher, 100 peso aller retour par personne) mais tout est mieux organisé.

Sur de nombreux kilomètres de chemin nous jouissons de vues splendides sur les chutes sans la foule, de loin, de très près, de dessous, de dessus toutes plus spectaculaires les unes que les autres. Nous faisons aussi un tour en bateau jusque sous les chutes, respirons l’énergie transcendante dégagée par la nature en furie, des flots que nous vivons au-delà de nos yeux ébahis. Quel cadeau !

Pour atteindre la chute sûrement la plus spectaculaire „Garganta del Diablo“ (la gorge du diable), 90 mètres, on prend un petit train et ensuite on marche un autre kilomètre sur l’eau et encore une fois le spectacle est à couper le souffle. Quelle expérience!

Après avoir fait le côté argentin (une bonne journée absolument nécessaire, deux seraient mieux et plus tranquilles) nous sommes tous les deux d’avis que le côté brésilien n’est pas indispensable. Il y a simplement plus de place, plus de nature, plus de liberté et au moins autant de vue sur les chutes que de l’autre côté.

Nous ressortons avec les jambes fatiguées de tant de marche mais nous ne savons pas encore que le pire est à venir. Les horaires de bus ne correspondent pas, il faut attendre. Nous prenons encore du temps pour prendre une douche et repartir vers le bus qui doit nous ramener du côté brésilien et là ça dure et ça dure le bus n’arrive pas. On est surpris de voir que c’est un bus d’une compagnie privée argentine qui repart côté brésilien, puis le chauffeur nous dit que non, il n’attendra pas à la frontière les 2 minutes dont nous avons besoin pour faire tamponner notre passeport. On est inquiets.
Une fois à la frontière effectivement il ne nous attend pas et nous dit que le prochain bus passe dans… 45 minutes. Là, notre cœur se serre. Dans à peine une heure notre bus de nuit pour Florianópolis part depuis la gare routière de Foz.
Je loue le calme de mon mari et me retient d’insulter ce chauffeur argentin sans cœur alors que celui de l’aller, brésilien, attend par principe alors qu’on avait tout notre temps. Je loue aussi mon mari qui avec sa rigueur nous fait toujours prendre des délais plus que raisonnables. Je souris dans un coin de la tête en pensant que la veille j’ai râlé en lui demandant de ne pas faire de stress, parce qu’on avait LARGEMENT le temps, en partant à 15 heures du parc pour avoir notre bus de 19 heures à 30 kilomètres plus loin.
Non, là, c’est le stress le vrai. Nous commençons à courir, notre gros sac derrière, le petit devant, c’est cocasse, et bien vite nous oublions la bonne douche que nous venons de prendre. Notre pouce en l’air ne servira à rien personne ne s’arrête pour nous arracher à cette course contre la montre et nous courrons jusqu’à la prochaine intersection où plus de bus passent normalement. En voilà un, Tobi accélère la course et arrive à l’arrêt alors que je suis loin derrière haletante, pour rien, le bus ne s’arrête pas. C’était le bus qui soit disant devait passer 45 minutes plus tard, il est passé 15 minutes à peine après et comme nous ne sommes plus à la frontière, son arrêt obligatoire, nous l’avons raté. Nous bouillons de rage et faisons peine à voir. Nous envisageons alors le taxi mais aucun ne passe à vide et OUF, un bus brésilien s’arrête. Sauvés ! Sauvés ? Non ! Notre bus de nuit part dans une demi heure, et il faut encore prendre un autre bus pour joindre la gare routière. Notre cœur bat la chamade. Les brésiliens sont trop sympas et curieux, que ce soit le chauffeur comme le cobrador (celui qui encaisse la monnaie dans le bus). Nous arrivons au terminal et nous ruons sur le bus qui va à la gare… et non, il fait d’abord une pause et part dans 20 minutes. C’est pas vrai ! Il nous reste à trouver un taxi qui nous fait un prix correct et nous dépose pile poile à temps pour sauter dans notre bus (en passant rapido par un snack pour attraper quelque chose à manger et se plaindre à la société de bus argentin qui nous a mis dans une telle situation).

Voilà pourquoi il faut toujours prévoir des grands délais « au cas ou ». Si nous avions raté ce bus nous aurions perdu 85€ + une nuit de plus ici sans envie. Je pense à maman qui comme Tobi prévoit toujours de grands délais et à papa qui comme moi est toujours à la bourre. Aie aie ! On a eu chaud aux fesses !
Maintenant, relax, nous avons une longue nuit devant nous, demain nous nous réveillerons à Florianópolis sur la côte 950km plus loin.

Merci d’être encore là à nous suivre ! A bientôt !

 

Infos pratiques

Si vous venez d’Argentine vous le savez déjà, mais sinon, prenez le plus de cash possible (dollars ou euros) avec vous pour les changer au Brésil au taux parallèle au taux officiel appelé « blue ». Ce n’est pas légal mais communément admis. Dans la rue vous n’aurez pas besoin de chercher loin, il suffit de connaître le taux officiel actuel (qui fluctue beaucoup) et de voir ce que l’arbolito (celui qui crie « cambio cambio » avec ses billets verts en l’air, comme un petit arbre) propose. Lorsque nous avons changé quelques dollars à Asunción mi-octobre en prévision de notre passage par les chutes argentines, au taux officiel on recevait environ 9 pesos pour 1 dollar alors qu’au blue, environ 16 pesos. Vous voyez que cela peut avoir des conséquences fondamentales pour la suite de votre voyage !

Si vous cherchez un endroit pour dormir à Puerto Iguazú n’hésitez pas une minute à aller au Garden Stone (site web, Av. Córdoba Nº 441). Il est à même pas 10 minutes à pied du terminal de bus et juste derrière le “party” Hostel Bambu que nous connaissons pour les nuits agitées à Rio et Foz dans les hostels éponymes.
En quelques minutes vous êtes au centre, restaurants et supermarchés y compris!

  2 comments for “Trois pays: Le barrage d’Itaipu et les chutes d’Iguazú

  1. Britta
    19. novembre 2015 at 17:32

    Und ich habe schon gedacht, die Niagara Wasserfälle seien gewaltig.

  2. Jette&Jarda
    25. novembre 2015 at 0:01

    Gewaltige Fotos! Und Ihr scheint Euer Globetrotter-Leben wirklich fabelhaft zu managen!
    Chapeau!
    Weiter so, wir reisen in Gedanken ein bisschen mit…
    Jette & Jarda

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